Contrairement à ce qu'on avait prétendu jusqu'ici, la découverte récente de documents de l'époque démontre que François Séguin dit Ladéroute,
époux de Jeanne Petit, est décédé entre le 30 novembre 1700 et le 10 octobre 1701, plutôt que le 9 mai 1704.
Jusqu'à tout récemment, on avait prétendu, sur la foi d'articles de l'ethnologue Robert-Lionel Séguin parus en 1947, que François Séguin dit
Ladéroute, ancêtre de la vaste majorité des Séguin du Canada, était décédé le 9 mai 1704 à l'Hôtel-Dieu de Montréal où il avait été inhumé
le lendemain. Cette prétention se fondait sur un acte de sépulture stipulant que ce jour-là, un certain " Pierre Séguin dit Ladéroute,
habitant de Boucherville "y avait été inhumé en présence de Messire Henri Mériel, prêtre du Séminaire de Ville-Marie, et du bedeau
Pierre Chantereau. Ni son épouse, ni aucun des membres de sa famille n'étaient mentionnés dans l'acte.
Étant donné qu'on n'avait pas trouvé d'acte de sépulture attestant le décès de François Séguin et qu'on avait découvert à ce moment-là aucun
Pierre Séguin vivant à Boucherville ou même en Nouvelle-France autre que le fils de François qui ne mourut qu'en 1760, on avait conclu qu'il
s'agissait d'une erreur du rédacteur de l'acte et qu'il aurait fallu y lire "François" plutôt que "Pierre".
Mais voilà qu'une étude approfondie de documents notariés de l'époque, en particulier des contrats de mariage de deux des filles de François -
Marie-Jeanne et Marie-Madeleine - vient démentir cette prétention de façon catégorique.
Signalons d'abord que le dernier acte relevé qui a été signé par François remonte au 30 octobre 1700.
Il s'agit d'un bail pour la location de deux vaches du Sieur de Niverville, consigné au greffe du notaire Marien Tailhandier.
Déjà à ce moment, sa signature semble plus hésitante que d'habitude, mais il est encore suffisamment en santé pour se rendre chez le notaire à
Boucherville pour signer le document.
C'est à compter de ce moment que la situation semble se détériorer. Quelques semaines plus tard, soit le 20 novembre 1700, il est déjà trop
malade pour assister à la signature du contrat de mariage de sa fille Marie-Madeleine avec Antoine Marie dit Ste-Marie chez le notaire
Pierre Raimbault, à Ville-Marie. Le contrat note en particulier que la mariée est représentée par "Jeanne Petit, femme de François Séguin,
habitant de Boucherville, absent pour son indisposition".
Moins d'un an plus tard, soit le 10 octobre 1701, son autre fille, Marie-Jeanne, signe un contrat de mariage avec Joseph Robidou en l'étude du
même notaire Pierre Raimbault. Dans ce document, cette fois, la mère de la mariée, Jeanne Petit, est dite "veufve de deffunt François Séguin
vivant habitant de Boucherville ". L'acte ajoute, en fin de texte, que "Charles Patenotre (époux de Françoise , soeur de la mariée) a promis et
s'est obligé de nourrir ledit Joseph Robidou et ladite Jeanne Séguin, futurs époux, pendant une année.....". Aussi dans l'acte de mariage, aucune mention de Francois mais Pierre son frère est présent.
Entre cette date et le mois de mai 1704 ( date où il était supposément décédé) François est toujours absent à la signature des contrats de
mariage de ses autres enfants. Ainsi, le 30 décembre 1703, au contrat de mariage de Marie-Madeleine avec François Achin (secondes noces),
c'est Charles Patenotre qui sert de témoin à la mariée (Étude Adhémar). À celui de Pierre et Barbe Filion, le 2 février 1704, ce sont François ,
frère du marié, et la femme de ce dernier, Marie-Louise Filion, soeur de la mariée, qui leur servent de témoins (Étude Adhémar).
Bien que l'acte de sépulture de François Séguin reste toujours introuvable, les documents ci-dessus indiquent qu'il serait décédé entre le 20
novembre 1700 et le 10 octobre 1701, soit près de trois ans plus tôt qu'on l'avait jusqu'ici prétendu.
Reste une question à résoudre. Si le Pierre Séguin, décédé le 9 mai 1704, n'est pas François, qu'y donc est-il?
Encore là, les régistres paroissiaux nous fournissent certains détails qui pourraient peut-être élucider le problème.
En effet, ils indiquent qu'un certain Pierre Ladéroute a servi de parrain aux baptêmes, à Montréal, de Jacquette-Angélique Demuis le 13 juin 1693
et de Pierre Picard, le 22 février 1693.
Il ne peut s'agir de Pierre, fils de François, puisqu'il n'avait que 10 ans à ce moment-là.
Il est aussi mention dans les régistres de Montréal d'un certain Pierre Séguin, présent au mariage de François Gloria et Marie Bénard,
le 31 octobre 1695. Rien n'indique que ce Pierre Séguin fut le fils de François qui n'avait que 13 ans et donc peu susceptible de voir
son nom figurer comme témoin à un acte de mariage.
Article écrit par Jean-Jacques Séguin #214
Séguinière de 1994 Volume 4 Numéro 2 Page 9